Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 28 septembre 2015

Construire un bon compromis

Dans le message précédent, nous avons vu l’intérêt de construire un compromis. Précisons d’emblée que le compromis n’est pas une solution universelle : il existe bien sûr des situations où il s’avère nécessaire de trancher, soit du fait de l’urgence, soit parce que l’ensemble des informations n’est pas disponible pour toutes les parties, ou encore pour d’autres raisons. Lorsque l’alerte au feu retentit dans la caserne des pompiers, ce n’est pas le moment de discuter de l’intérêt d’intervenir sur le sinistre ou pas. En dehors de ces situations qui doivent rester exceptionnelles, le compromis est envisageable dans la plupart des cas.
L'art du compromis peut s'acquérir dès le plus jeune âge.

L’esprit dans lequel construire un compromis s’inscrit dans celui de la communication non violente. Dans les deux cas, l’on s’appuie sur les mêmes principes :

- Prendre d’abord le temps d’échanger. Si l’autre personne intervient alors que je suis occupé à une tâche importante, il est possible, la plupart du temps, de répondre : « Je termine cette tâche et je suis à toi dans tel délai » Que ce soit deux minutes ou une demi-heure, l’important est de préciser la durée et de s’y tenir.

- Une fois face à la personne, rester calme, sans se laisser déborder par les émotions. Il ne s’agit pas d’éliminer les émotions qui peuvent monter en moi et qui de toute façon trouveront un moyen de s’exprimer, mais de leur laisser leur juste place. Pour cela, je tente de considérer la situation le plus objectivement possible, sans jugement : quels sont les faits ? Qu’est-ce qui est en train de se passer ?

- Donner ma propre vision des faits et des ressentis qu’ils ont provoqués en moi. C’est le moment où mes émotions peuvent s’exprimer, mais sans excès ni théâtralisation. Poursuivre en exprimant fermement mon point de vue et ma demande : il ne s’agit pas de céder ou de capituler a priori.

- Être à l’écoute de la personne ; cela signifie non seulement que je sois attentif aux paroles qu’elle prononce, mais aussi à ce qu’elle exprime par ailleurs : intonations et puissance de voix (langage paraverbal), gestuelle et attitude du corps (langage non verbal). Souvent ces derniers langages complètent très utilement l’information apportée par la parole.

- Poser des questions pour faire préciser à l’autre ce que je n’ai pas bien compris, et au besoin reformuler avec mes propres mots, ce qui permettra éventuellement d’éclaircir certains points qui ne me paraissaient pas clairs. L’écoute et le questionnement me permettent de comprendre le point de vue de l’autre, même si je ne le partage pas : je respecte la personne, même si ses actes ou ses déclarations me paraissent inappropriés par rapport à la situation.

- En dernier lieu, proposer une solution en accord avec les deux points de vue. Il est également possible de demander à la personne quel compromis elle serait en mesure de proposer. Si cette solution paraît acceptable dans son principe, elle peut ensuite être affinée dans ses détails afin que les deux interlocuteurs y trouvent chacun leur compte.


Renaud Cherel

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lundi 21 septembre 2015

Concession ou compromis?

Bien des conflits, que ce soit dans le contexte professionnel ou dans les relations amicales et familiales, peuvent être résolus par des compromis. Mais bien souvent, l’on confond compromis et concession : le compromis est alors perçu comme une forme de soumission à l’autre, une sorte de capitulation, de défaite, un aveu de faiblesse. Dans ces conditions, on comprend que certains n’envisagent en aucun cas des solutions de compromis.


Une concession est le fait d’abandonner de son propre gré à son interlocuteur un point de discussion, un avantage. Un compromis est un arrangement dans lequel les deux interlocuteurs se font des concessions mutuelles. Autrement dit, en introduisant la réciprocité, le compromis réintroduit l’équilibre rompu par la concession.

En faisant une concession à l’autre, je laisse tomber une de mes idées ou une de mes préférences ; je mets volontairement de côté une part de ce que je suis. À l’inverse, en mettant en œuvre un compromis, je passe un accord de coopération, dans le respect de l’autre et de moi-même. Ce faisant, je résous le problème de désaccord sans qu’aucun des deux n’ait l’impression d’avoir été lésé.

L’on peut faire des concessions pour éviter les conflits, par peur de représailles, pour s’assurer un confort immédiat ou pour d’autres très bonnes raisons. Peu à peu, on en prend l’habitude, au point de ne plus en être conscient. On entre alors dans un processus qui peut devenir très négatif, un rapport de force perpétuel – même celui-ci a été occulté – où il y a un gagnant : l’autre, et un perdant : soi-même. À la longue, ce processus conduit à des conséquences négatives pour les deux interlocuteurs :

- Pour soi-même : toutes ces concessions qu’on avait contenues en soi risquent un jour d’exploser violemment, avec des conséquences imprévisibles et parfois dramatiques : une rupture définitive, un acte violent qu’on regrettera par la suite. Ou bien le processus mène progressivement à une extinction de la personne qui se replie sur soi, sans pouvoir exprimer ce qu’elle est.

- Pour l’autre : il va prendre de plus en plus l’ascendant, et insensiblement va se montrer plus exigeant, plus dur, plus centré sur lui-même.

Cette évolution des deux interlocuteurs ne va pas dans le sens d’un progrès ou d’un développement de leurs potentialités positives.

À l’inverse, dans un compromis, chacun des deux interlocuteurs respecte l’autre, tout en se respectant soi-même. Cela demande évidemment une certaine exigence, celle d’exprimer mes besoins et d’écouter ceux de l’autre. Dans un certain sens, le compromis est moins confortable que la concession. Mais si "je" et "tu" sont pris en considération, alors "nous" peut exister.

En observant le comportement des gens autour de nous, il est facile de voir que certains ne font aucun compromis et que d’autres ont tendance à céder, à faire très souvent des concessions. Les premiers sont souvent qualifiés de « forts » et les seconds de « faibles ». Mais la véritable force se situe-t-elle vraiment là ?

Dans le prochain message, nous examinerons quelques outils pour construire un bon compromis.


Renaud Cherel

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lundi 14 septembre 2015

L'identification, mécanisme de défense

Lors d’un stage de développement personnel, des stagiaires expliquent leur façon habituelle de fonctionner. Marjorie raconte : « Depuis toute petite, j’ai mis en place une stratégie d’adaptation. Je cherche à être plein de personnages différents, et je peux jouer plusieurs rôles dans la même journée. Je me pose toujours la question : "Qui j’ai en face de moi et comment je vais me comporter par rapport à cette personne ?" Je me situe par rapport à un rôle à jouer. »

Nathanaël adopte souvent des comportements assez semblables à ceux de Marjorie : « Au fond, j’ai besoin d’être aimé, admiré. Et pour y arriver, j’ai tendance à adopter les manières de faire de personnes que j’admire et qui me servent de modèles. J’ai plusieurs modèles en réserve, si je puis dire, et je choisis celui qui convient à la situation. »

Lucile approuve : « Pour moi, j’attache beaucoup d’importance au diplôme, au titre ; je suis fière de le dire. Je m’identifie à ce qui donne de l’image, ce qui donne de la sécurité, de l’identité, mais pas à ce que je suis réellement, au fond… Vous et moi, on est des caméléons, en fait. On cherche à l’extérieur des modèles de bons comportements. »

Marjorie, Nathanaël et Lucile utilisent un mécanisme de défense particulier, l’identification, par le moyen duquel ils s’attribuent inconsciemment des aspects d’autres personnes, qu’ils désirent posséder du fait de l’attrait ou de l’utilité que ces aspects représentent pour eux.

Précisons qu’au cours de leur développement, la plupart des humains passent par une phase d’imitation de modèles : les bébés acquièrent beaucoup de savoir-faire par imitation, les enfants imitent leurs parents, les ados se conforment à des modèles qu’ils admirent ou aux codes du groupe auquel ils appartiennent. Mais, au fur et à mesure qu’il acquiert son autonomie, l’individu va progressivement mettre en place ses propres échelles de valeurs, ses propres standards de comportement. Il aura donc moins recours à l’identification.


Pourtant, certaines personnes continuent toute leur vie d’avoir recours à l’identification presque constamment. Il faut reconnaître que c’est un mécanisme de défense particulièrement efficace, comme l’explique Lucile : «  J’aime changer de tenue ; mais changer de tenue, c’est s’adapter à son environnement. J’y fais gaffe, car je cherche à m’y fondre comme un caméléon : pour être acceptée dans un groupe, il faut prendre les critères de ce groupe-là. Pour moi, l’image, c’est faire bonne figure, montrer que je suis forte et non pas vulnérable. » Professionnellement, l’identification à un rôle – que ce soit le rôle du « bon » vendeur, du « bon » ouvrier ou du « bon » directeur – est très efficace et très valorisée par notre société.

L’utilisation d’un mécanisme de défense n’est pas mauvaise en soi ; mais y avoir recours de manière excessive présente des risques. À force de m’identifier à des modèles, à force d’imiter les autres, je risque de me perdre moi-même, de ne plus être en contact avec mon vrai « moi ».

Alors, usez-vous ou abusez-vous de l’identification ?


Renaud Cherel

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lundi 7 septembre 2015

Généralisation

La généralisation est un processus mental qui nous permet de comprendre le monde en regroupant certains éléments dans une catégorie donnée. Ainsi en affirmant « tous les animaux qui ont des plumes, un bec et qui pondent des œufs sont des oiseaux », cela me permet de dire que cet animal inconnu vu dans un zoo est un oiseau. Cependant, dans le domaine humain, et particulièrement la psychologie humaine, les généralisations sont souvent source d’erreurs, de malentendus, voire de conflits. En effet, nous sommes tous différents, chaque individu est unique et la palette des comportements possibles est immense. Bien sûr, on peut toujours affirmer des généralités comme « tous les hommes sont mortels ». Mais dès que l’on s’aventure à décrire les comportements ou les émotions ressenties par des personnes, il est difficile d’affirmer que cela s’applique à tout le monde.

Attention à ne pas généraliser en dénonçant une généralisation !
C’est pourquoi, personnellement, je préfère utiliser dans ma communication des expressions comme « la plupart d’entre nous » ou « la majorité des gens » plutôt que « tout le monde » ; de même, je préfère dire « la plupart du temps » plutôt que « toujours » ou « jamais ».

Prenons quelques exemples :
« Tout le monde veut être en bonne santé » : non, certains personnes peuvent trouver un certain confort dans la maladie, ou y avoir recours pour exprimer quelque chose d’indicible autrement.
« Tous les consommateurs recherchent la nouveauté, c’est pourquoi le mot "nouveau" fait vendre » : pas forcément, certains au contraire recherchent la continuité et la constance et peuvent être déstabilisés par ce qui est nouveau.
« Chacun veut faire les choses bien » : non, certains peuvent privilégier la vitesse d’exécution, et d’autres cherchent avant tout le résultat, en négligeant les détails jugés comme accessoires.

On pourrait ainsi multiplier les exemples à l’infini. En fait, beaucoup d’entre nous (mais pas tous !) avons tendance à penser que les autres fonctionnent comme nous : si dans telle situation, j’ai cette réaction, je m’attends spontanément que les autres aient plus ou moins le même type de réaction que moi. Or, l’expérience montre que ce n’est pas forcément le cas, et certains comportements peuvent me prendre complètement par surprise. C’est d’ailleurs la raison qui pousse un grand nombre de gens (mais pas tous !) à fréquenter préférentiellement des personnes du même milieu social ou du même groupe qu’eux : il y a de plus fortes chances que ces personnes réagissent de la manière attendue.

Bien sûr, avec l’expérience, on peut acquérir davantage de souplesse et ne pas être surpris ou choqué par des réactions inattendues. Mais cette évolution avec l’âge ne se rencontre pas chez tous ; certaines personnes au contraire, ont tendance avec le temps à durcir leurs positions et à se raidir davantage.

En ces temps où les événements nous confrontent de plus en plus à des gens issus de contextes différents du nôtre, soyons attentifs à ne pas généraliser et à apprécier les différences qui sont source d’enrichissement mutuel.


Renaud CHEREL

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