Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 5 mars 2012

Date de péremption


Certains d’entre nous passent beaucoup de leur temps à anticiper, à se demander de quoi demain sera fait, et à prévoir ce qui peut arriver de façon à prendre les mesures nécessaires pour y faire face ; d’autres, au contraire, vivent dans le présent, sans trop se préoccuper de l’avenir. Pourtant, dans notre vie quotidienne, nous sommes sans cesse sollicités à nous projeter dans l’avenir.

Par exemple, chaque fois que nous manipulons des médicaments ou des aliments conditionnés, nous trouvons sur l’emballage une date de péremption, au-delà de laquelle le produit n’est plus consommable. Dans sa banalité, cette date de péremption passe la plupart du temps inaperçue ; et pourtant, si on prend le temps d’y réfléchir un instant, elle nous rappelle quelques vérités profondes :

D’abord, c’est un rappel de la corruptibilité des choses : rien de dure éternellement, tout est amené à se détériorer, à se gâter, à pourrir. Au-delà d’un certain délai, les propriétés de cet aliment ou de ce médicament auront tellement changé que non seulement il ne sera plus nourrissant ou apte à me guérir, mais il risque de devenir un poison pour moi. Ce produit qui m’était utile sera devenu inutile pour moi, voire toxique.

Ensuite, la date de péremption est une projection dans l’avenir. Prenez un aliment emballé quelconque, il vous projette dans un avenir plus ou moins proche :
- pour les viandes et poissons, les fruits et légumes, les laitages frais, le délai est de quelques jours ;
- le lait UHT vous projette dans un avenir de trois ou quatre mois ;
- la confiture vous envoie dans un futur de deux ans ;
- les pâtes alimentaires et certains légumes secs dans deux ou trois ans ;
- et des conserves peuvent vous emporter encore plus loin, cinq ans ou davantage.

Mais certaines catégories d’aliments ne portent pas de date de péremption ; c’est le cas par exemple du vin : s’il s’agit d’un bon cru, vous pouvez conserver votre bouteille aussi longtemps que vous le désirez, à condition d’avoir une bonne cave, bien sûr ! Et aucune règle ne vous enjoindra de le consommer avant telle date : à vous de juger quel est le meilleur moment pour le boire…

Ces considérations peuvent avoir un écho plus personnel : est-ce que je me considère comme quelque chose d’utile ? Et dans ce cas, quelle est ma « date de péremption » personnelle ? Cette date de péremption, on peut imaginer que ce sera le moment où la société jugera que je n’ai plus d’utilité… Est-ce que je me vois comme les produits frais ou comme les boîtes de conserves ? Ou bien est-ce que je m’imagine, de ce point de vue, plutôt comme un bon vin, qui se bonifie avec l’âge, et qui n’a pas de date de péremption définie ? Ai-je une idée du moment où l’on jugera que je ne suis plus utile à personne ? Ou est-ce que pour moi la valeur et la dignité de la personne humaine sont d’un autre ordre que son « utilité » ?

Renaud CHEREL


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