Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

mardi 31 janvier 2017

Guérir de l'abandon

Le sentiment d’abandon est souvent lié à une expérience douloureuse précoce, dont on n’a pas fait le deuil et dont le souvenir persiste sans que nous en ayons conscience.

Pourtant, une telle expérience – ressentie, mais pas forcément réelle – peut aussi s’avérer positive. Il ne manque pas d’exemples des personnes qui, après avoir été abandonnées d’une façon ou d’une autre dans leur enfance, ont magnifiquement rebondi et ont su faire preuve d’ingéniosité, de courage pour surmonter les épreuves de la vie. Je pense à Anny Duperey qui a perdu ses deux parents accidentellement alors qu’elle était âgée de huit ans et demi. Autrement dit, la séparation leur a servi à gagner en autonomie, malgré les conditions brutales dans lesquelles elle s’est produite. Ils ont pu alors rebondir en faisant appel à leur créativité pour inventer des solutions nouvelles face aux problèmes auxquels ils furent confrontés par la suite, être plus résilients.


Inversement, des enfants surprotégés par leurs parents ou leur entourage peuvent se trouver ensuite démunis face aux aléas de l’existence. Faut-il alors aller jusqu’à souhaiter une certaine forme d’abandon pour permettre à l’enfant d’accéder à l’autonomie ? Je répondrai que oui, au moins de manière symbolique : en effet, dans sa vie fœtale et ses premiers mois après la naissance, l’enfant vit en union ou en fusion avec sa mère, il ne ressent pas de séparation entre « toi » et « moi », c’est-à-dire entre le monde extérieur et lui-même. C’est peu à peu qu’il va apprendre à se séparer du monde extérieur, à mettre une distance entre « moi », « toi », puis « lui » et « eux ». Dans ce processus, soit dit en passant, la figure du père joue un rôle important, comme symbolique de la séparation. Plus tard, pour permettre à cette évolution de se dérouler normalement, il sera nécessaire de marquer la distance entre parents et enfants et d’encourager ceux-ci à l’éloignement. Pour leur apprendre à se séparer de façon sereine et confiante, sans crainte d’être abandonnés : par exemple en leur laissant des moments de solitude dans la semaine, en les encourageant à dormir de temps en temps hors du domicile dans une autre famille, en allant passer des vacances seul ailleurs qu’avec les parents, etc.

Voilà des exemples d’action préventive concernant les enfants pour leur éviter – peut-être, car on ne maîtrise pas tout – d’éprouver un fort sentiment d’abandon une fois adultes. Mais que faire quand on l’éprouve soi-même ? Une façon de combattre ce sentiment d’abandon consiste à améliorer son image de soi, développer sa confiance en soi, apprendre à gérer ses émotions lorsqu’elles s’avèrent trop intenses. Pour cela, on peut avoir recours à des outils de développement personnel, seul ou en groupe.

Un travail avec un psychologue, un psychothérapeute ou encore une psychanalyse pourront permettre une exploration plus approfondie afin de déceler l'origine de cette peur d'être abandonné et d’apprendre à l’apprivoiser. Car je peux aussi apprendre à accepter ma partie blessée, à la nommer, à la reconnaître sans en avoir honte et à la réinscrire dans mon histoire personnelle aujourd'hui.

 

Renaud CHEREL

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mardi 24 janvier 2017

Abandon et sentiment d'abandon


Floriane, très attachée à son employeur et à son emploi, a bien réussi dans sa carrière professionnelle, mais sa vie personnelle n’est pas très heureuse. Toute son énergie consacrée au travail, elle a du mal à se faire des amis, mettant de la distance lorsque la relation devient trop proche. Et ses relations avec les parents sont plutôt orageuses, alors qu’elle désire toujours être aimée d’eux.

Côme collectionne les aventures amoureuses sans lendemain ; et pourtant, il rêve secrètement de trouver l’âme sœur, la femme avec qui partager le restant de ses jours. Quand il examine ses comportements, il se rend compte que, pour ne pas risquer la déception amoureuse, c’est souvent lui qui fait en sorte de provoquer la rupture.

Suzon est souvent en souffrance dans sa relation à l’autre et ses attitudes sont souvent excessives : elle peut passer des grandes démonstrations d’affection à l’agressivité et à la jalousie, ou bien se replier sur soi et s’enfermer dans son désespoir de ne pas être comprise. Elle pense qu’elle n'est pas assez bien, qu’elle n’est pas à la hauteur des attentes de l’autre.

Eugénie explique qu’elle est une personne très compliquée et se demande si quelqu’un est capable de la comprendre. Dans beaucoup de situations, elle se sent impuissante, en insécurité, et ressent souvent un fort sentiments d’injustice, tout en se sentant incapable d’intervenir.

Ces personnes souffrent du sentiment d’abandon, elles éprouvent l’angoisse d’être délaissée, la peur d’être quittées définitivement par ceux auxquels elles sont liées ou dont elles dépendent, ou encore la sensation d’être livrées au pouvoir d’un tiers sans capacité de se défendre. Ce sentiment peut naître à la suite d’un choc vécu dans l’enfance : enfant réellement abandonné par l’un de ses parents ou les deux, mais le plus souvent situations vécues subjectivement comme un abandon. Par exemple, un parent absent car absorbé par son activité professionnelle ; le décès d’une tante ou d’un grand-père auquel l’enfant était très attaché ; l’arrivée d’un bébé auquel les parents vont consacrer beaucoup d’attention ; le fait d’être confié à une nounou pendant que les parents travaillent… et même un événement vécu comme traumatisant pendant la vie fœtale. Mon expérience m’amène à penser que l’événement causal peut parfois remonter plus loin : des traumatisme vécus par les parents, grands-parents ou avant, qui n’ont pas été digérés et ont été transmis à la descendance.

Ainsi, un grand nombre de faits de la vie ordinaire peuvent agir comme déclencheurs du sentiment d’abandon. Bien sûr, la plupart d’entre nous vont oublier ces événements. Mais pour certaines personnes, l’émotion ressentie alors perdure, souterrainement, jusque dans leur vie d’adulte. En toute logique, elles peuvent conclure inconsciemment : « puisque j’ai été abandonné(e), c’est que je ne suis pas digne d’être aimé(e) ». Cette croyance est d’autant plus solide qu’elle est inconsciente ; et elle va colorer toutes les relations sociales et affectives, apportant son lot de souffrance et de solitude.

Pourtant, cette blessure n’est pas inguérissable. Nous verrons dans le prochain message que des chemins peuvent être empruntés pour en faire un atout.

 

Renaud CHEREL

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mardi 17 janvier 2017

Comment choisir plus sereinement


Il ne s’agit pas de faire le meilleur choix dans l’absolu, car dans la plupart des situations, il existe plusieurs choix possibles. Qui peut dire sur l’instant quelles seront les conséquences à long terme de tel ou tel choix ? Sauf en de rares exceptions, nous ne possédons pas toutes les données de la situation, et par conséquent nous ne savons pas si nous faisons le meilleur choix possible. Il peut arriver qu’une décision nous paraisse mal venue sur le moment, et puis s’avère positive par la suite en nous ouvrant des perspectives favorables et inattendues. À l’inverse, certains choix qui nous paraissaient raisonnables dans l’instant peuvent avoir des conséquences négatives non anticipées. Soyons donc modestes et acceptons de faire des erreurs.

Il s’agit ensuite de relativiser l’importance de nos choix : la plupart d’entre eux ne sont pas vitaux et leurs conséquences, positives ou négatives, auront un impact modeste dans notre vie. À l’inverse, d’ailleurs, si nous sommes confrontés à une situation de vie ou de mort (accident, urgence absolue), bien souvent nous n’hésitons guère et suivons notre instinct. Je me souviens d’une nuit où ayant entendu du bruit dans la maison, je me suis retrouvé en pyjama dans le noir face à la lampe torche d’un cambrioleur qui montait l’escalier. D’instinct je lui ai foncé dessus en criant ; lui, surpris, a fait demi-tour et a dévalé l’escalier. Je l’ai poursuivi dans le jardin, mais il a sauté le mur et a disparu dans la nuit. Après coup, je me suis dit que j’avais été bien imprudent : s’il avait été armé ? Mais c’était fait et les conséquences de mon geste avaient été heureusement positives.

Toutes les situations ne sont pas aussi dramatiques et urgentes. Il est donc utile d’avoir en tête les enjeux de mes choix. Si je dois choisir une tenue vestimentaire, les enjeux ne sont pas les mêmes si c’est dans le cadre d’une journée de travail ordinaire ou pour un rendez-vous avec un employeur potentiel. Quand les enjeux sont mineurs, à quoi bon hésiter trop longtemps ? Je me fais confiance et tout ira bien. Bien sûr, cela n’est pas si facile pour des tempéraments hésitants ; mais le fait de relativiser, d’écouter son intuition et de se faire confiance peut aider.

Si les enjeux sont plus importants – et que je ne suis pas dans une urgence absolue –, je peux prendre le temps d’identifier mon désir : qu’est-ce que je veux vraiment ? Où est-ce que je veux aller ? S’il est conseillé de préciser ma destination, il est utile aussi de savoir d’où je pars : quelle est ma situation actuelle ? Cela me permettra d’évaluer l’écart existant entre l’état existant et l’état souhaité, puis de mettre en place des moyens adéquats pour atteindre cet état souhaité, après avoir évalué au mieux les contraintes et les obstacles sur la route. Ensuite, dans le processus de décision, je peux évidemment prendre conseil de gens compétents dans tel ou tel domaine ; mais à la fin, je décide moi-même et j’assume mon choix.

 

Renaud CHEREL

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mardi 10 janvier 2017

Difficulté de choisir

Avant de se décider, Julienne a l’habitude de se renseigner, écoute différents avis, puis tranche en assumant la responsabilité de sa décision, sachant qu’il lui arrive de faire des erreurs. Quant à Victorien, il n’hésite pratiquement jamais et décide très vite sans trop considérer les conséquences. Mais il regrette rarement son geste : oui, il y a eu des dégâts collatéraux, mais à quoi servirait d’attendre une meilleure décision, qui, si elle arrive trop tard, serait encore pire ?

Mais tout le monde ne fonctionne pas comme Julienne ou Victorien, et en regardant autour de nous, nous constatons que beaucoup de gens ont des difficultés à choisir.

Ignace n’arrive pas à faire ses choix et hésite longuement entre les différentes options possibles. Quand il finit par faire un choix, c’est comme s’il se jetait à l’eau, les yeux fermés ; mais souvent, au regard de conséquences qu’il n’avait pas prévues, il le regrette ou bien en rejette la responsabilité sur d’autres que lui-même.

Clémentine hésite aussi, mais pour d’autres raisons, sous l’effet d’une certaine paresse, comme si l’acte de choisir lui demandait une énergie au-dessus de ses forces. Alors, elle préfère attendre un peu et remet sa décision à plus tard : peut-être que les événements feront en sorte qu’elle n’aura pas le choix…

Sheila a du mal à choisir, car il lui faut sécuriser ses choix. Elle va donc considérer au préalable toutes les conséquences, directes et indirectes, de chacune des options possibles, avant de choisir celle dont les implications seront les moins défavorables ; ces considérations lui prennent évidemment beaucoup de temps.

On peut penser que la façon de vivre actuelle joue dans notre difficulté à choisir.

Une première raison tient à la multiplicité des choix que nous avons à faire au quotidien, face à l’offre pléthorique de la société de consommation. Le moindre produit, le moindre service est disponible sous une multitude de prix, de formes, d’emballages différents, chacun avec ses avantages et ses inconvénients. Aux caractéristiques du produit lui-même s’ajoutent éventuellement des considérations sur l’impact que son acquisition peut avoir sur notre santé, sur l’emploi ou sur l’environnement. Tous ces éléments augmentent considérablement la difficulté du choix.

Une seconde raison tient à notre liberté de choix. En effet, dans la société où vivaient nos aïeux, la plupart des individus se conformaient au scénario défini par leur naissance. Leur classe sociale, leur sexe, leur place dans la fratrie, le métier de leurs parents, leur religion, et d’autres facteurs encore, déterminaient leur vie de façon assez précise et – pour la plupart d’entre eux – sans guère de remise en question. Aujourd'hui au contraire, même si ces éléments continuent d’exister pour chacun de nous, tout nous pousse à trouver par nous-mêmes notre épanouissement individuel. Chacun de nous porte sur ses épaules la lourde responsabilité de son développement personnel et de son propre bonheur. Du coup, les décisions que nous prenons ont un poids autrement plus lourd : même des choix anodins peuvent revêtir une importance quasi vitale pour certains d’entre nous.

Nous verrons dans le prochain message comment faciliter nos choix.

 

Renaud CHEREL

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mardi 3 janvier 2017

Offrir et recevoir des cadeaux


Des amis échangent sur les cadeaux de Noël.

-« Mon mari m’a offert un aspirateur, je n’ai pas trouvé cela très élégant ! s’exclame Servane. Je n’aime pas trop les cadeaux utilitaires, je préfèrerais quelque chose de plus romantique. Et puis qu’est-ce que ça veut dire ? Il trouve que je ne fais pas bien le ménage ? Il n’a qu’à le faire, lui !

- Moi, explique Mauger, pour ne pas risquer ce genre de mésaventure, j’offre des chèques ou des bons d’achat : ainsi la personne choisit ce qu’elle veut, elle ne pourra pas se plaindre d’avoir reçu un cadeau qui ne lui plaisait pas !

- C’est louable sur le principe, tempère Vivienne, mais tu reconnaîtras que ce n’est pas très poétique… Je préfère recevoir un cadeau de peu de valeur, mais dans lequel la personne s’est investie, a donné de son temps et de son imagination. Pour tout dire, les cadeaux qui me touchent le plus sont ceux qui ont été fabriqués par le donneur et non achetés à l’extérieur.

- Mais on ne peut pas fabriquer tous les cadeaux, objecte Prosper. L’important, c’est l’intention, et la manière de donner compte autant que le contenu, à mon avis. Cela dit, j’ai du mal avec ma sœur : rien ne lui plaît, elle a déjà tout… je tombe toujours à côté, et elle me le fait sentir, c’est humiliant… »

Pendant cette période de Noël et de la fin d’année, nous avons probablement reçu des cadeaux et nous en avons donné. Les enfants donnent et reçoivent spontanément, sans cacher leur plaisir ou leur déception. Pour nous adultes, c’est plus compliqué, les cadeaux s’inscrivent dans un tissu de relations sociales, réglés par des coutumes et des règles de convenance. À ce titre, ils ne sont pas neutre ni totalement gratuits : nous faisons des cadeaux pour faire plaisir à l’autre, mais aussi pour nous-mêmes. Peut-être pour plaire et nous sentir aimé de l’autre, pour nous rassurer, nous valoriser, pour conforter notre appartenance au groupe. Peut-être aussi parfois pour envoyer des messages ou régler des comptes avec certaines personnes.

En plus du message que je tente d’envoyer à l’autre, les cadeaux que j’offre disent quelque chose de moi-même et de ma relation au destinataire, et aux autres de manière générale. Car dans l’échange d’un cadeau, on peut dire qu’il y a trois personnes en présence : le donneur, le receveur, et le spectateur imaginaire de la représentation en cours. En cherchant à faire plaisir à l’autre, il peut arriver que j’offre ce qui m’a manqué, ce que j’aurais aimé recevoir ; c’est peut-être l’occasion d’affirmer mon originalité et ma singularité ; ou bien celle de prendre du pouvoir sur le destinataire, en lui offrant ce qu’il ne pourra jamais me rendre…

Se mettre à la place de la personne à qui l’on offre n’est pas toujours un exercice facile. Mais acceptons aussi de ne pas être parfaits et de nous tromper parfois.

Et vous, avez-vous fait des cadeaux ? En avez-vous reçu ? Et comment avez-vous vécu cela ?

 

Renaud CHEREL

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