Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 30 novembre 2015

Demander de l'aide, mécanisme de défense

Faut-il attendre la dernière extrémité pour demander de l'aide?

Wilfrid se rendait avec sa femme Peggy à un mariage, à une centaine de km de chez eux. Son GPS était en panne, mais il a assuré maîtriser la situation : « Pas de problème, je connais le chemin ». Sauf qu’il a pris la mauvaise sortie d’autoroute… et qu’il n’a jamais voulu s’arrêter dans une station-service pour demander sa route. Résultat, alors qu’ils étaient partis avec un peu d’avance, ils sont arrivés à la cérémonie avec un bon quart d’heure de retard. Ce genre d’incident, qui se renouvelle assez fréquemment, a le don d’énerver Peggy : « Mais pourquoi ne demande-t-il pas de l’aide ? Ce n’est tout de même pas compliqué ! »

Sylviane, divorcée récemment, a du mal à s’organiser avec ses deux enfants en bas-âge. Mais elle a osé faire appel à son réseau d’amies, et celles-ci ont répondu positivement : elles la soutiennent et lui rendent de petits services au quotidien. Pour Sylviane, le fait de se sentir soutenue dans ses moments de galère compte autant que le service lui-même.

Valérien a été licencié et il a du mal à retrouver un emploi. Mais il n’en a pas parlé à ses amis, de peur d’être déconsidéré. Il veut s’en tirer tout seul et ne sollicite aucune aide de ses proches ; au contraire, il affiche en public un air dégagé alors que son moral est au plus bas et qu’il se sent déprimer de plus en plus.

Le recours à autrui est considéré comme un mécanisme de défense par Alain Braconnier, qui le définit comme la capacité de « rechercher l’aide et le soutien de quelqu’un d’autre que soi pour faire face à une situation difficile ».

On peut demander de l’aide pour recevoir différents types de soutiens : un soutien matériel ou financier ; un soutien intellectuel par l’apport d’informations utiles pour résoudre une situation compliquée ; un soutien d’estime pour se sentir rassuré ; un soutien émotionnel pour se sentir plus écouté, compris…

Cependant, nous sommes souvent réticents à demander de l’aide, pour de nombreuses raisons : par timidité, par crainte de se sentir redevable, de montrer ses faiblesses, par peur d’être déconsidéré ou rejeté par les autres. Ce peut être aussi par peur de déranger les autres, de leur infliger de nouveaux soucis alors qu’ils ont déjà leurs propres problèmes à résoudre. Les hommes ont souvent plus de difficulté que les femmes à demander de l’aide : par éducation, ils doivent paraître forts, indépendants et capables. Et tous, quand nous nous sentons dépressifs ou angoissés, nous tendons à nous refermer sur nous-mêmes alors même que nous aurions encore plus besoin d’être écoutés, soutenus, aidés.

Ces comportements s’appuient sur une fausse équivalence : avoir besoin d’aide serait un signe de faiblesse, alors que fournir de l’aide, ce serait être fort. Pourtant, nous sommes des êtres sociaux et chacun de nous a besoins d’aide à certains moments. La plupart des humains aiment rendre service et sont plutôt heureux d’être sollicités pour apporter une aide. Semaine prochaine, nous verrons comment demander simplement de l’aide.


Renaud CHEREL


Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
    Les mécanismes de défense psychologique
    Savoir demander de l'aide

lundi 23 novembre 2015

A la fois nomade et sédentaire

Dans le message précédent, j’ai opposé nomades et sédentaires. Avant d’aller plus loin, j’aimerais préciser que nous autres, Occidentaux, éprouvons le besoin de polariser les concepts par dualités : le noir opposé au blanc, le bien au mal, le pur à l’impur, le courage à la lâcheté, etc., contrairement aux Orientaux qui préfèrent considérer tous les intermédiaires entre deux opposés. 

Jusqu’à un certain point, ces oppositions sont justifiées : elles nous permettent certainement de mieux conceptualiser les choses, et de préciser ou de caractériser chacun des concepts étudiés. Mais ensuite, revenant à la réalité concrète, il nous faut prendre en compte toutes les nuances qu’elle nous présente, ce que bien souvent nous omettons de faire. Il en est évidemment de même pour le sujet qui nous occupe, l’opposition entre nomadisme et sédentarité. L’image du nomade véhicule des idées de liberté, de mouvement, de découverte de choses nouvelles ou inconnues ; le nomade est également insaisissable, imprévisible et donc a toujours posé dans nos sociétés sédentarisées la question de la sécurité. À l’inverse, l’image du sédentaire évoque la stabilité, la continuité, l’ancrage et donc la solidité ; par extension, une certaine sécurité.

Pourtant, on peut dire que chacun des deux a besoin de l’autre : le monde ne cesse de changer et le sédentaire a besoin de mouvement pour s’adapter au changement. De son côté, le nomade transporte avec lui une certaine permanence, sans laquelle il tomberait dans l’errance. Aujourd'hui, dans notre société, nous sommes tiraillés entre ces deux tendances. D’un côté, nous sommes poussés à la sédentarité, à la stabilité. Pour prendre deux exemples actuels :
- l’accès à la propriété privée du logement, même si elle n’est pas accessible à tous, est présenté comme un droit ; 
- par le biais d’Internet, les services à domicile se généralisent, et incitent les particuliers à se sédentariser encore davantage. 
Mais dans le même temps, nous sommes de plus en plus poussés à la mobilité, aussi bien dans la carrière professionnelle où la flexibilité est recherchée, que dans les loisirs, où les croisières et voyages en tous genres ne se sont jamais autant développés.

Dans ces conditions, difficile d’opposer sédentaires et nomades ! Les deux types de comportement sont nécessaires à la vie de la société, comme pour nous-mêmes. En général, on tend à être davantage sédentaire en vieillissant ; mais les seniors forment aujourd'hui les gros bataillons des agences de voyages… Par ailleurs, certains individus, très sédentaires physiquement, sont très nomades dans leur tête : je pense à Marcel Proust, reclus dans sa chambre une grande partie de sa vie, dont l’esprit était si vagabond. Plus près de nous, combien d’internautes conversent depuis chez eux avec des « amis » originaires de la planète entière !
Marcel Proust a composé son oeuvre sans presque jamais
quitter sa chambre... 

Nous gagnerons en harmonie en acceptant, en nous et autour de nous, les aspects sédentaires et nomades pour en tirer plus de richesse à travers leurs complémentarités. À nous de les doser selon le type d’activité, mais aussi selon les périodes de notre vie, certaines étant plus propices au nomadisme et d’autres nous appelant à plus de sédentarité.


Renaud CHEREL


Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
    Nomades et sédentaires
    Permanence et changement

lundi 16 novembre 2015

Nomades et sédentaires

Nos ancêtres lointains étaient essentiellement des nomades
Nous sommes tous issus de peuples nomades, qui se sont sédentarisés avec le développement de l’agriculture. Mais aujourd'hui, contrairement à la tendance historique qui a vu la sédentarité s’accentuer en France, il semble que le nomadisme se développe à nouveau.
- Du fait des incertitudes sur le marché de l’emploi, les travailleurs sont plus mobiles qu’avant, et de moins en moins d’emploi sont garantis à vie.        
- Le nombre de SDF est en forte augmentation depuis le début de la crise de 2008.        
- Ceux qui ont un emploi stable et un domicile fixe passent plus de temps dans les transports pour se rendre au travail et voyagent davantage que par le passé.        
- Enfin, on peut parler d’un nomadisme virtuel, quand Internet nous met en relation avec pratiquement le monde entier.

Les technologies d'aujourd'hui favorisent le nomadisme.
Bien sûr, la différence essentielle entre les nomades et les sédentaires est liée à leur mobilité ; mais on peut dire aussi qu’elle se manifeste dans leur rapport au temps. Les nomades ont un regard à court terme, ils considèrent d’abord les événements et les choses à brève échéance ; à l’inverse, les sédentaires ont un regard à moyen ou à long terme, ils considèrent les choses et les événements dans la durée. Pas étonnant alors que, dans notre société où tout s’accélère, le nomadisme prenne de l’ampleur. Mais le nomade traditionnel fait partie d’un groupe itinérant avec lui. Alors qu’aujourd'hui, le groupe a explosé : le risque est grand que les nomades modernes ne se transforment en errants sans racines et sans but.

Certains auteurs, comme Claude Riveline, Professeur à l'École des mines de Paris, analysent le fonctionnement de la société à l’aide de l’opposition nomades – sédentaires. Ainsi, explique-t-il, dans l’entreprise, le producteur ou le fabriquant sera le plus souvent du côté sédentaire alors que le vendeur ou l’agent commercial sera du côté nomade. Dans la vie publique, l’élu est de type nomade alors que l’administration qui le seconde est sédentaire. Et dans le couple, même si les modèles évoluent rapidement, la femme, si elle est mère de famille, sera plutôt sédentaire et son conjoint plutôt nomade. Il existerait ainsi une confrontation entre sédentaires et nomades dans toutes les sphères de la société.

Les événements graves survenus à Paris semaine dernière peuvent aussi être analysés sous cet angle : contrairement aux armées conventionnelles opérant dans une logique sédentaire, les terroristes fonctionnent dans une logique nomade ; très mobiles, ils opèrent dispersés par petits groupes en accordant une large place à l’improvisation. Mais ils se battent pour une organisation qui cherche à s’installer, à se sédentariser… Je n’irai pas plus loin sur ce sujet, car incompétent dans le domaine de l’analyse politique. Mais cette approche nomade/ sédentaire me paraît à la fois originale et féconde pour tenter de déchiffrer certains aspects du monde dans lequel nous vivons.

Ajoutons que, même s’il existe des personnalités plus enclines au sédentarisme et d’autres au nomadisme, la plupart d’entre nous sont à la fois sédentaires et nomades. Nous verrons dans le prochain message comment gérer ces deux aspects parfois conflictuels en nous-mêmes.


Renaud CHEREL


Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
    A la fois nomade et sédentaire
    Permanence et changement
    Changement et blocages

Liens externes:
    Nomades et sédentaires, l'irréductible affrontement

lundi 9 novembre 2015

Neurones miroirs

Ludovique s’extasie devant la capacité à communiquer de son fils Noël, âgé de quelques mois : quand elle lui fait des sourires, il répond aussitôt en souriant à son tour. Et cela ne se limite pas aux sourires : Noël répond très souvent à ses mimiques par des expressions semblables. Si petit, il est déjà capable de prendre l’air triste ou sérieux ou de faire la moue en regardant le visage de sa mère.

Très spontanément l'enfant imite les attitudes de sa mère
et partage ses états émotionnels.
Jean-Christophe est en apprentissage en chaudronnerie ; en ce moment, il perfectionne sa maîtrise de la soudure en observant la gestuelle de son patron de stage, qui a trente ans de métier derrière lui. Après avoir observé avec attention la façon de s’y prendre, il effectue la soudure à son tour. Au fil des exercices, son geste se fait plus adroit et lui-même se sent plus sûr de lui.

Jeanne est en conversation téléphonique avec sa meilleure amie. En entendant sa voix, elle partage ses émotions, et sans la voir, elle se représente si bien ses ressentis que ceux-ci apparaissent sur son visage : elle fronce les sourcils quand elle sent la colère de son amie, et rit quand elle la devine joyeuse.

Ces réactions qui font partie de notre vie quotidienne sont en fait liée à l’existence dans notre cerveau de neurones miroirs. Les neurones miroirs ont été découverts par des neurophysiologistes italiens il y a une vingtaine d’années, d’abord chez le singe. Ils ont la particularité de s’activer lorsqu'un individu exécute une action mais aussi lorsqu'il observe un autre individu exécuter la même action, ou même lorsqu'il imagine une telle action tout en restant immobile. Ces neurones sont regroupés en systèmes, qui permettent l’imitation des gestes : par conséquent, ils jouent un grand rôle dans l’apprentissage.

Par ailleurs, en dehors des systèmes miroirs correspondant aux comportements moteurs, il en existe d’autres qui sont liés aux émotions. Ceux-ci permettent de simuler l'état émotionnel d'autrui dans notre cerveau et donc de mieux identifier les émotions éprouvées par les autres, notamment ceux avec qui nous sommes plus liés émotionnellement. L’activité de ces neurones nous permet ainsi de nous mettre en quelque sorte à la place de l’autre, c’est pourquoi on les appelle encore neurones empathiques.

Quelles leçons tirer de ces observations ? Je vous en propose deux : 
       
- Prendre conscience de l’influence que je peux avoir sur les autres, notamment ceux avec qui j’ai des liens émotionnels forts : mes enfants, ma famille, mon entourage, mes amis, mes relations professionnelles et notamment les personnes dont je suis responsable...

- La contagion émotionnelle joue dans les deux sens : si je trouve telle personne agressive, est-ce totalement lié à son comportement, ou bien me renvoie-t-elle en miroir une part de ma propre agressivité ? L’effet miroir est souvent beaucoup plus puissant qu’on ne le pense. Si moi-même je travaille à mettre plus de cohérence entre ce que je dis, ce que je pense et ce que je fais, à être plus serein et moins stressé, alors cela aura forcément un impact sur l’attitude des autres envers moi.


Renaud CHEREL


Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
    Le langage non verbal
    Relations humaines
    Qu'est-ce que l'empathie?

lundi 2 novembre 2015

Quand tutoyer et quand vouvoyer?

William Alexander a publié dans le Los Angeles Times un schéma sur l’usage de « vous » et « tu » en français. Je ne résiste pas au plaisir de vous le traduire !
Remarque : comme vous le savez bien, dans les situations réelles, c’est encore plus compliqué que cela ! Comment voulez-vous que les étrangers s’y retrouvent ?


Renaud CHEREL


Vous pouvez lire aussi dans ce blog des articles sur la même thématique :
    Tutoiement et vouvoiement