Réflexions d'un coach spécialisé dans les transitions, à partir des événements et rencontres de la vie quotidienne...

lundi 24 novembre 2014

Cultivez la douceur avec fermeté

L’alliance de la douceur et de la fermeté confère une grande force à ceux qui savent la pratiquer. Ne sommes-nous pas attirés par les personnes qui exercent leur force avec douceur et dont la présence dégage une impression de sécurité ? Au contraire, face à une personne dure, la relation est plus difficile : certains ont tendance à se rebeller, d’autres se sentent insécurisés et cherchent à fuir, d’autres encore ne disent mot et se soumettent à contrecœur. Mais dans le domaine professionnel, tout nous incite à penser que la douceur n’est pas de mise : dans un univers de concurrence et de performance, ce sont les durs, les mordants, les requins qui sont gagnants ; les doux n’y ont pas de place.

La douceur, ça se cultive...
Pourtant, on peut être doux et fort à la fois ; la plus grande force n’est pas celle qui s’exprime dans l’explosion de la violence. Les adolescents le savent bien, qui poussent leurs parents à leurs limites : quand la colère explose, on sent bien qu’on s’est laissé déborder et qu’au fond c’était un signe de faiblesse. De par sa nature, la douceur refuse la violence ; utilisée avec discernement, elle éloigne les menaces et les offenses envers soi-même et envers les autres. Inversement, la douceur n’est pas mollesse, qui n’offre aucune résistance à la pression et se laisse écraser. La mollesse conduit au laxisme, lequel laisse tout faire sans s’y opposer et renonce à l’exigence, par confort ou parfois par principe.

Ainsi, la douceur n’exclut pas l’exigence, et on peut être doux tout en demeurant ferme et solide : ferme sur ses convictions et ses valeurs, doux dans la façon de les exprimer et de les partager, en restant à l’écoute de celles des autres. Car le doux cherche le bien de l'autre et fait en sorte de ne pas le blesser. Il est en relation dans l’empathie, la bienveillance, la prévenance. Le doux est patient, il écoute, console et encourage son vis-à-vis sans chercher à s’imposer par la force. 

Cultivez la douceur, et elle se développera en vous, elle deviendra progressivement une ressource sur laquelle vous pourrez compter dans vos relations avec les autres. Comment s’y prendre ?

Première étape : la douceur passe d’abord par le corps. Je peux installer de la douceur dans ma manière d’agir, de non-agir ou de réagir. Je peux agir sur le ton de ma voix, dans un débit moins précipité, éventuellement dans la lenteur du geste pour éviter la brusquerie. Je peux mettre de la douceur dans le choix de mes paroles et préférer parfois le silence à l’intervention verbale rapide, mais cassante ou maladroite.

Seconde étape : faire de la douceur un état d’esprit, une qualité du cœur qui enveloppe sans étouffer, qui préfère laisser pousser patiemment, un mode de relation qui veille sans surveiller. Pratiquée ainsi, la douceur deviendra peu à peu un état d’être qui, une fois appliqué à ma pensée, à mes paroles et à mes gestes, va renforcer ma sérénité mais aussi le sentiment de sécurité des personnes qui m’entourent.


Renaud CHEREL


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    Dureté ou douceur
    Communication non défensive

lundi 17 novembre 2014

Dureté ou douceur ?

Publicité pour de la literie
Nous vivons dans une société qui se durcit régulièrement depuis plusieurs décennies, notamment dans le domaine professionnel. C’est principalement une dureté morale et psychologique qui se développe : matériellement, nous ne connaissons plus les famines et les épidémies qu’ont subies nos ancêtres, sans compter les violences des guerres et l’insécurité générale. Mais cette sorte de dureté n’en est pas moins difficile à vivre, d’autant plus que les structures traditionnelles de solidarité – la famille élargie, le voisinage, le village dont on connaissait tous les habitants, les corporations – sont fragilisées aujourd'hui. Pourtant, cette dureté est souvent jugée nécessaire pour assurer de la part des entreprises des performances croissantes, face à un marché mondial de plus en plus concurrentiel. Et, à l’échelle individuelle, il peut nous paraître impossible d’allier douceur et efficacité, deux notions incompatibles.
 
Face à cette dureté de la société, le marketing s’est rapidement focalisé sur le concept de douceur qui est devenu très à la mode dans les messages publicitaires, à commencer par le fameux « Un peu de douceur dans un monde de brutes » affiché par une grande marque de chocolat… il y a 20 ans déjà. La douceur s’affiche partout : depuis les produits pour le corps, laits hydratants, gels douche, crèmes de beauté, jusqu’aux aliments, chocolat, potages, yaourts, café, en passant par le papier toilette, les adoucissants pour le linge ou même des stations de radio ou des automobiles.

La douceur serait-elle l’opposé de la dureté ? Platon (encore lui !) s’était déjà penché sur cette question il y a 2 400 ans, lorsqu’il réfléchissait sur la démocratie dans « La République ». Une spécialiste de ce philosophe, Monique Dixsaut, explique que selon Platon, « une certaine forme de culture comporte en elle-même un germe, un risque de mollesse. La vertu nationale, cette "douceur athénienne" qui aurait donné naissance au plus humain des régimes, la démocratie, engendré la civilisation la plus brillante et la plus raffinée, contient en elle ce dont elle risque de périr. » Mais – et cela me paraît extrêmement pertinent – Platon n’oppose pas les choses comme on pourrait s’y attendre : il associe douceur et fermeté, fruits d’une éducation bien conduite, d’une part, qu’il oppose à dureté et mollesse, conséquences d’une mauvaise éducation d’autre part. Une culture appropriée redresse la sauvagerie naturelle tout en préservant et en favorisant la douceur naturelle.

Cette distinction est intéressante car elle permet d’affirmer que la douceur n’exclut pas la fermeté, bien au contraire : sinon, elle tombe dans la mollesse, un excès qui est une sorte de laisser-faire, « une tolérance indifférente envers toutes les transgressions, et une curiosité frivole à l'égard de toute espèce d'innovation. » Que ce soit dans le domaine privé, dans l’éducation des enfants ou les relations avec les proches, ou bien dans le domaine professionnel, la douceur alliée à la fermeté font des merveilles et sont d’une efficacité redoutables. À travers quelques exemples, nous verrons dans le prochain article comment allier douceur et fermeté sans tomber dans mollesse ou dureté.


Renaud CHEREL


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    Cultivez la douceur avec fermeté

lundi 10 novembre 2014

Sortir d'une autocritique malsaine

L’autocritique peut être une pratique saine, à condition d’être entreprise dans un esprit constructif, et non pas pour me dévaloriser aux yeux des autres ou de moi-même.

Miserere (Rouault)
La dévalorisation de soi s’accompagne souvent d’un certain nombre d’autoaccusations: j’ai tendance à m’attribuer des fautes que je n’ai pas commises. Parfois, face à la colère des autres, j’interprète celle-ci comme liée à une de ces fautes de ma part, sans savoir exactement laquelle… en bref je me sens responsable et coupable de choses qui, en fin de compte, ne dépendent pas de moi.

Et les conséquences ne s’arrêtent pas là, car mon attitude vis-à-vis de moi-même se répercute sur mon attitude vis-à-vis des autres : si je me soupçonne d'être prétentieux, je risque de juger ceux qui ont une bonne estime d'eux-mêmes comme étant prétentieux. Parent, je risque de dévaloriser mes enfants en projetant sur eux mes propres échecs : en n’étant pas satisfait de leurs résultats, c’est moi que je remets en cause. Ou bien je peux m’interdire d’agir par peur de l'échec et, en miroir, condamner l’action des autres sous un certain nombre de prétextes.

Quand on observe comment fonctionnent les prétentieux, on s’aperçoit qu’ils représentent le pôle opposé de la même logique. Alors que dans la dévalorisation, j’estime que je suis moins bon que les autres, dans la prétention je crois être meilleur que les autres. Prétentieux, je ne m’attribue jamais les fautes, même quand j’en suis l’auteur ; je juge et critique facilement les décisions des autres ; j’estime que la meilleure façon de faire est la mienne ; je me justifie par toutes sortes d’arguments, etc.
La dévalorisation de soi, comme la prétention, peuvent amener à me réfugier dans une attitude cynique et aigrie face à la société et à la vie en général, où tout est sujet à critique. Prétention et dévaluation sont donc les deux faces opposées d’une même attitude : dans les deux cas, je suis dans la comparaison.

Pour sortir de cette dualité, il est nécessaire de changer de perspective pour aller vers une autre logique qui ne s'alimente plus de la comparaison. Les deux pôles en sont l'estime de soi d'un côté et la vraie humilité de l'autre. Au passage, le mot humilité vient de humus, terre : l'homme est de la terre et non pas du ciel ; autrement dit, il n'est pas un dieu, quoiqu'il fasse ou pense.

Alors d’autres attitudes seront possibles :
- Je conçois mes erreurs comme des étapes nécessaires d’un chemin de progression. Cela ne supprime pas pour autant l’exigence personnelle ; mais je pourrai admettre des erreurs à condition de savoir en tirer les leçons qui permettront de les éviter par la suite.
- Je demeurer dans le non-jugement, la neutralité bienveillante à mon propre égard, et par conséquent sans juger les personnes – moi-même ou les autres. Ce qui ne m’empêche pas de juger, après analyse, des décisions, des comportements ou des actions.
- Je me reconnais à ma juste valeur, et réciproquement j’admets l’autre dans sa différence, en évitant autant que possible la comparaison.


Renaud CHEREL


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    Francais, champions de l'autocritique
    Humilité et modestie

lundi 3 novembre 2014

Français, champions de l'autocritique


Sondage après sondage, les Français se montrent volontiers autocritiques et pessimistes pour leur pays. Tout le monde vous le dira : rien ne va dans notre pays, les hommes politiques sont des incapables, l’économie de la France décline, l’avenir est bouché. Les initiatives nouvelles et les projets de changement sont très fréquemment critiqués et finalement rejetés. Pourtant, nous bénéficions d’un niveau de vie plutôt élevé, d’un accès gratuit aux soins médicaux, aux écoles et aux universités. La France, cinquième puissance mondiale par le PIB, est très attractive puisqu’elle demeure au premier rang mondial de la fréquentation touristique. Cette contradiction est une énigme pour les étrangers : « Comment les Français, qui ont inventé la joie de vivre (…), peuvent-ils être si résolument tristes ? », s’est demandé l’hebdomadaire britannique The Economist.

Des chercheurs et des sociologues ont travaillé sur cette question et concluent que, si le chômage actuel ne contribue pas à l’optimisme, cette tendance à l’autocritique ne date pas d'aujourd'hui, elle est ancrée dans notre culture. Pour certains, cette capacité à constamment critiquer, accuser, dénoncer, se moquer est une conséquence des sentiments révolutionnaires toujours présents dans l’inconscient collectif. Certains pays, comme les États-Unis, ont une culture de la surestimation de soi, et d'autres pays, comme la France, ont une culture de la sous-estimation de soi. Ce penchant s’expliquerait par des attitudes mentales acquises à l’école et à d’autres occasions de socialisation, plus particulièrement pendant la jeunesse.

Il y a quelques années, j’écoutais sur France Culture un débat sur l’école auxquels contribuaient un auteur anglais et une personne de l’Éducation Nationale. L’auteur citait un sondage en deux parties effectué auprès d’élèves de CM2 dans une cinquantaine de pays.

La première partie du test consistait en une évaluation du niveau de lecture des élèves en utilisant des critères comparables dans les différents pays. Les élèves français se situaient assez bien sans être en tête du groupe de pays, à un niveau comparable à celui des anglais et des allemands.

Dans la seconde partie, les élèves étaient invités à évaluer leur propre niveau de lecture. Là, surprise : les jeunes français s’évaluaient comme étant d’un niveau très mauvais. Ils se situaient dans les dernières places du classement, juste devant l’Afrique du sud et un autre pays que je n’ai pas retenu. Tous les autres pays européens avaient une opinion meilleure de leurs performances.

Ce type de sondage semble indiquer que, dès l’enfance, nous sommes conditionnés pour nous juger plus mauvais que nous ne sommes. Cependant, fort heureusement, ce conditionnement, s’il existe, n’a rien d’absolu ! D’une part, nous pouvons nous déconditionner, et je proposerai quelques pistes en ce sens dans le prochain article ; et d’autre part, rien ne nous empêche d’encourager et de développer chez nos enfants – et chez les jeunes avec qui nous sommes en contact – une saine estime de soi. Certes un regard critique est une bonne chose, mais quand il aboutit au blocage des initiatives et qu’il interdit d’agir par peur de l’échec, il devient toxique. Pouvons-nous changer d’attitude ?


Renaud CHEREL


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    Estime de soi et confiance en soi
    Sortir d'une autocritique malsaine
    Optimisme, pessimisme

Liens externes :
    Les Francais aussi déprimés que les Ouzbeks